les critiques contre la la loi antipiratage
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les critiques contre la la loi antipiratage
Marc Rees
La Fédération Français de Télécom (FFT) n’a pas été la seule à demander une modification de l’économie du projet de loi création et internet. Arguments techniques à l’appui, celle-ci réclame que la dernière étape de la réponse graduée, la suspension, soit remplacée par l’amende. Plus juste, techniquement plus réalisable, la ponction financière évite aussi les distorsions de concurrence entre les acteurs, entre ceux qui peuvent suspendre uniquement la liaison internet, quand d’autres seront contraints à opter pour des mesures alternatives.
Précisions de taille : la note avait été rédigée lorsque Free était encore membre de la FFT, qu’il a quittée début 2008. On peut donc y associer le FAI. Par contre, on doit oublier Numéricable, qui est toujours membre de la FTT : celui-ci nous a demandé expressément de dire qu’il était « pour » la suspension. Le fait que le président de Numéricable Pierre Danon soit chairman d’Eircom, plus important FAI en Irlande qui va tester va des mesures de filtrage et/ou de riposte graduée peut être une part d'explication...
Free n'a lui pas baissé les bras et s’est aussi fendu d’une note explicative adressée aux parlementaires intéressés par le projet Création sur Internet.
Des avancées au Sénat trop timides
Dans la note que nous avons pu nous procurer, Free se félicite d’abord de certaines avancées après la première lecture du projet au Sénat : la mise en oeuvre d’une réelle gradation de la riposte dans la mesure où l’avertissement par lettre recommandée est désormais nécessaire avant toute mesure de suspension, le retrait de la mesure de filtrage dans le nouvel article L.336-2 du CPI (voir cependant nos remarques), ou la « timide amélioration sur l’offre légale, en particulier sur le cadre de la chronologie des médias et certains délais suggérés pour accélérer la mise en oeuvre d’une nouvelle chronologie mieux adaptée à la nécessité des offres légales »
Mais le texte est loin d’avoir la moyenne dans le cœur du FAI : Free constate surtout que « en l’état, le projet ne respecte pas pour autant l’équilibre des Accords qui ont été signés et qui mettaient en balance d’un côté les efforts consentis par les FAI dans la lutte contre le téléchargement illégal et de l’autre les conditions de mise en oeuvre d’offres légales beaucoup plus attractives ». Pour preuve, la place de la lutte antipiratage, en quasi-monopole face au volet de l’offre légale, parent pauvre du texte.
Le piratage, la crise et la casquette
Free ne s’arrête pas en si bon chemin : le fournisseur, comme la CNIL, a un peu du mal à comprendre le piratage puisse être « l’unique raison de la crise de la musique et du cinéma ». Des entrées en salles de cinéma sont d'ailleurs en progression très forte en 2008, une major comme Universal Music qui voit son résultat net grimper de +17,7%. « Certaines études témoignent d’une baisse significative du piratage en 2008 (- 20% selon BVA), et celui-ci n’atteint que très marginalement le cinéma et les oeuvres audiovisuelles françaises (13 films US pour 1 français selon l’Alpa, aucun titre français dans le top 200 de The Pirate Bay) ».
D'importants effets de bord
Free estime que « la réponse graduée proposée, pourrait être un remède pire que le mal : techniquement, les pirates peuvent eux-mêmes détourner les requêtes vers des abonnés « innocents » et les dérapages se multiplient en Grande-Bretagne, où un dispositif de réponse graduée conventionnelle se met en place : internautes poursuivis à tort (affaire Atari/Daveport),accès à un site légal rendu impossible après filtrage d’une page sensible
(Wikipédia/Scorpions) ».
L'intervention précise du juge dans la suspension
Pour le FAI, pas de doute : compte tenu de l’importance d’Internet aujourd’hui, « commodité essentielle comme l’eau ou l’électricité » comme le rappelait Eric Besson dans son plan France Numérique 2012, seul le juge doit pouvoir exiger une suspension (ou à la rigueur EDF). « Suspendre l’internet pendant plusieurs mois parce qu’un adulte, son enfant ou quelqu’un de passage a téléchargé quelques films non protégés, apparaît comme une mesure particulièrement pénalisante au regard des faits reprochés. Seule l’autorité judiciaire doit être à même de prendre une mesure de suspension ». Et donc de tenir compte de chaque situation en fonction de la gravité et de la proportionnalité des mesures. C’est n’est rien d’autre que ce qu’ont approuvé plus de 88% des eurodéputés dans le cadre du Paquet Télécom. On sait que la commission des lois n'a pas retenu une telle proposition à l'Assemblée Nationale...
Free demande encore de ne pas ordonner de suspension de l’accès internet si techniquement c‘est impossible sans suspension d‘autres services (téléphone, TV). Et il faut dans le même ordre d’idée renoncer au ralentissement des débits. Rejoignant la FTT, Free considère que cette dégradation volontaire des débits comme sanction alternative à la suspension peut mettre à mal l’intégrité des réseaux et comble de l’ironie, impacter des internautes non suspendus. Le Fai pense lui aussi que l’amende est plus simple et moins attentatoire aux libertés individuelles.
Des garanties nettes et précises sur les prises en charge financière
Sentant le vent mauvais, le FAI demande des garanties financières sur la prise en charge de tous les chapitres du projet Hadopi. Il ne faudrait pas en effet que par des artifices juridiques plus ou moins accidentels, la ministre de la Culture fasse supporter sur le dos des FAI (et donc des abonnés) les coûts de cette politique pénale. « La prise en charge financière par l’Etat de l’ensemble des dispositifs à déployer dans les entreprises pour identifier les abonnés concernés à partir des données transmises, acheminer les messages d’avertissement, suspendre temporairement et partiellement les services de certains abonnés, consulter en temps et heure le « répertoire des suspendus », reste aujourd’hui très incertaine » constate avant tout Free. On se souvient que dans les projections d’un économiste, Olivier Bomsel, l’intérêt de faire supporter ces coûts sur le dos des Fai devrait pousser ces acteurs tout doucement vers la voie du filtrage, par souci d’économies..
Filtrer le filtrage du projet Hadopi
Dans ce long courrier, on l'opérateur demande un moratoire, Free pressent encore le filtrage à tous les niveaux et l’atteinte à la loi dans l’économie numérique qu’il sous-tend dans le degré de responsabilité des acteurs du web. L’Hadopi fait peu de cas au principe de subsidiarité qu’impose la LCEN en cas d’atteinte à un droit d’auteur. Le projet permet d’imposer n’importe quoi, donc le filtrage, n’importe où (éditeur, hébergeurs, et autres intermédiaires techniques), n’importe quand. Free ressuscite aussi les promesses de l’Elysée qui était d’interdire le filtrage tant que les expérimentations n’auront pas lieu, épaulé par une étude de faisabilité économique et technique.
Avec cette nouvelle intervention d’un important acteur des télécoms, une chose est sûre : on constate une nouvelle fois combien sont loin les fameux accords de l’Élysée et la belle harmonie que nous ressert à chaque discours la ministre de la Culture.
La Fédération Français de Télécom (FFT) n’a pas été la seule à demander une modification de l’économie du projet de loi création et internet. Arguments techniques à l’appui, celle-ci réclame que la dernière étape de la réponse graduée, la suspension, soit remplacée par l’amende. Plus juste, techniquement plus réalisable, la ponction financière évite aussi les distorsions de concurrence entre les acteurs, entre ceux qui peuvent suspendre uniquement la liaison internet, quand d’autres seront contraints à opter pour des mesures alternatives.
Précisions de taille : la note avait été rédigée lorsque Free était encore membre de la FFT, qu’il a quittée début 2008. On peut donc y associer le FAI. Par contre, on doit oublier Numéricable, qui est toujours membre de la FTT : celui-ci nous a demandé expressément de dire qu’il était « pour » la suspension. Le fait que le président de Numéricable Pierre Danon soit chairman d’Eircom, plus important FAI en Irlande qui va tester va des mesures de filtrage et/ou de riposte graduée peut être une part d'explication...
Free n'a lui pas baissé les bras et s’est aussi fendu d’une note explicative adressée aux parlementaires intéressés par le projet Création sur Internet.
Des avancées au Sénat trop timides
Dans la note que nous avons pu nous procurer, Free se félicite d’abord de certaines avancées après la première lecture du projet au Sénat : la mise en oeuvre d’une réelle gradation de la riposte dans la mesure où l’avertissement par lettre recommandée est désormais nécessaire avant toute mesure de suspension, le retrait de la mesure de filtrage dans le nouvel article L.336-2 du CPI (voir cependant nos remarques), ou la « timide amélioration sur l’offre légale, en particulier sur le cadre de la chronologie des médias et certains délais suggérés pour accélérer la mise en oeuvre d’une nouvelle chronologie mieux adaptée à la nécessité des offres légales »
Mais le texte est loin d’avoir la moyenne dans le cœur du FAI : Free constate surtout que « en l’état, le projet ne respecte pas pour autant l’équilibre des Accords qui ont été signés et qui mettaient en balance d’un côté les efforts consentis par les FAI dans la lutte contre le téléchargement illégal et de l’autre les conditions de mise en oeuvre d’offres légales beaucoup plus attractives ». Pour preuve, la place de la lutte antipiratage, en quasi-monopole face au volet de l’offre légale, parent pauvre du texte.
Le piratage, la crise et la casquette
Free ne s’arrête pas en si bon chemin : le fournisseur, comme la CNIL, a un peu du mal à comprendre le piratage puisse être « l’unique raison de la crise de la musique et du cinéma ». Des entrées en salles de cinéma sont d'ailleurs en progression très forte en 2008, une major comme Universal Music qui voit son résultat net grimper de +17,7%. « Certaines études témoignent d’une baisse significative du piratage en 2008 (- 20% selon BVA), et celui-ci n’atteint que très marginalement le cinéma et les oeuvres audiovisuelles françaises (13 films US pour 1 français selon l’Alpa, aucun titre français dans le top 200 de The Pirate Bay) ».
D'importants effets de bord
Free estime que « la réponse graduée proposée, pourrait être un remède pire que le mal : techniquement, les pirates peuvent eux-mêmes détourner les requêtes vers des abonnés « innocents » et les dérapages se multiplient en Grande-Bretagne, où un dispositif de réponse graduée conventionnelle se met en place : internautes poursuivis à tort (affaire Atari/Daveport),accès à un site légal rendu impossible après filtrage d’une page sensible
(Wikipédia/Scorpions) ».
L'intervention précise du juge dans la suspension
Pour le FAI, pas de doute : compte tenu de l’importance d’Internet aujourd’hui, « commodité essentielle comme l’eau ou l’électricité » comme le rappelait Eric Besson dans son plan France Numérique 2012, seul le juge doit pouvoir exiger une suspension (ou à la rigueur EDF). « Suspendre l’internet pendant plusieurs mois parce qu’un adulte, son enfant ou quelqu’un de passage a téléchargé quelques films non protégés, apparaît comme une mesure particulièrement pénalisante au regard des faits reprochés. Seule l’autorité judiciaire doit être à même de prendre une mesure de suspension ». Et donc de tenir compte de chaque situation en fonction de la gravité et de la proportionnalité des mesures. C’est n’est rien d’autre que ce qu’ont approuvé plus de 88% des eurodéputés dans le cadre du Paquet Télécom. On sait que la commission des lois n'a pas retenu une telle proposition à l'Assemblée Nationale...
Free demande encore de ne pas ordonner de suspension de l’accès internet si techniquement c‘est impossible sans suspension d‘autres services (téléphone, TV). Et il faut dans le même ordre d’idée renoncer au ralentissement des débits. Rejoignant la FTT, Free considère que cette dégradation volontaire des débits comme sanction alternative à la suspension peut mettre à mal l’intégrité des réseaux et comble de l’ironie, impacter des internautes non suspendus. Le Fai pense lui aussi que l’amende est plus simple et moins attentatoire aux libertés individuelles.
Des garanties nettes et précises sur les prises en charge financière
Sentant le vent mauvais, le FAI demande des garanties financières sur la prise en charge de tous les chapitres du projet Hadopi. Il ne faudrait pas en effet que par des artifices juridiques plus ou moins accidentels, la ministre de la Culture fasse supporter sur le dos des FAI (et donc des abonnés) les coûts de cette politique pénale. « La prise en charge financière par l’Etat de l’ensemble des dispositifs à déployer dans les entreprises pour identifier les abonnés concernés à partir des données transmises, acheminer les messages d’avertissement, suspendre temporairement et partiellement les services de certains abonnés, consulter en temps et heure le « répertoire des suspendus », reste aujourd’hui très incertaine » constate avant tout Free. On se souvient que dans les projections d’un économiste, Olivier Bomsel, l’intérêt de faire supporter ces coûts sur le dos des Fai devrait pousser ces acteurs tout doucement vers la voie du filtrage, par souci d’économies..
Filtrer le filtrage du projet Hadopi
Dans ce long courrier, on l'opérateur demande un moratoire, Free pressent encore le filtrage à tous les niveaux et l’atteinte à la loi dans l’économie numérique qu’il sous-tend dans le degré de responsabilité des acteurs du web. L’Hadopi fait peu de cas au principe de subsidiarité qu’impose la LCEN en cas d’atteinte à un droit d’auteur. Le projet permet d’imposer n’importe quoi, donc le filtrage, n’importe où (éditeur, hébergeurs, et autres intermédiaires techniques), n’importe quand. Free ressuscite aussi les promesses de l’Elysée qui était d’interdire le filtrage tant que les expérimentations n’auront pas lieu, épaulé par une étude de faisabilité économique et technique.
Avec cette nouvelle intervention d’un important acteur des télécoms, une chose est sûre : on constate une nouvelle fois combien sont loin les fameux accords de l’Élysée et la belle harmonie que nous ressert à chaque discours la ministre de la Culture.
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